Les scientifiques ont depuis un peu plus d’une dizaine d’années disposé des récepteurs GPS très précis un peu partout sur la surface de la Terre et observent ainsi le déplacement de la surface de la Terre en différents points (voir Mon GPS doit savoir l’heure). Une application bien connue est celle de l’étude de la tectonique des plaques, mais ces données permettent également d’analyser des événements tels que les tremblements de terre ou les éruptions volcaniques et sont quotidiennement utilisées en sciences de la Terre pour estimer la forme changeante de la Terre.
Moins connue est l’utilisation des données GPS pour évaluer la vitesse de fonte des glaces en Antarctique.
Une analogie simple, qui requiert un peu d’imagination, permet de bien comprendre le procédé. Prenons un coussin sur lequel on verse du sucre en poudre. Un creux va se former dans le coussin, à l’endroit qui correspond au milieu du tas de sucre, et de manière presque imperceptible, les contours du creux vont quant à eux prendre un peu de hauteur. Retirons maintenant le sucre petit à petit : le coussin va au fur et à mesure reprendre sa forme initiale. Dans cette analogie, le coussin représente la surface de la Terre. Eh oui ! À grande échelle, la surface de la Terre peut se déformer sous l’effet de ce qu’on y dépose. Le sucre représente la couche de glace qui recouvre le continent (sous forme de neige lorsqu’elle tombe, ou d’eau lorsqu’il s’agit de la retirer). Ayant placé des récepteurs GPS sur le continent autour des couches de glace, les scientifiques observent les variations annuelles de hauteurs du GPS dues tantôt à la neige qui tombe, tantôt à la glace qui fond et se déverse dans l’océan. À partir de ces variations, ils peuvent alors estimer la vitesse de fonte de la glace antarctique et par conséquent la quantité d’eau déversée dans l’océan et l’augmentation du niveau des océans.
Ces variations se produisent également sur des échelles de temps très longues, lors des périodes glaciaires. La dernière ère glaciaire s’est achevée il y a une dizaine de milliers d’années et aura duré environ une centaine de milliers d’années. La Terre garde encore la marque de l’énorme couverture de glace qui recouvrait alors la surface.
L’animation représente un cycle glaciaire. L’ère glaciaire est marquée par la formation d’une énorme couche de glace, qui creuse la surface de la Terre en certains endroits et tend à soulever les abords du site (observer précisément les flèches noires au-dessus de la surface de la Terre). Lors de la fonte, la surface reprend progressivement sa forme et l’océan est alimenté par la glace fondue. Cependant, même après la fonte totale de la glace, la Terre n’a pas encore repris sa forme initiale et continue de s’aplanir. Cela durera soit jusqu’à ce que la surface soit de nouveau plate, soit jusqu’à la prochaine ère glaciaire, qui relancera le processus.
Dans ce type d’étude, les mathématiques interviennent à de nombreuses étapes. L’étude de la vitesse et du sens de déplacement des continents requiert des outils d’analyse et de calcul différentiel. Des outils probabilistes permettent d’évaluer les erreurs d’estimation. Les cycles glaciaires, quant à eux, peuvent être étudiés à partir des cycles de Milankovitch qui permettent de faire le lien entre le climat de la Terre et ses différents changements de position par rapport au soleil (excentricité orbitale, obliquité, précession) ce qui requiert notamment une bonne connaissance de la trigonométrie.
Brève rédigée par Julien Gazeaux (Université de Newcastle) d’après les travaux de l’équipe de géomatique de l’université de Newcastle.
Pour en savoir plus :
- Sur la page web de Christophe Vigny, la tectonique des plaques, le rebond post-glaciaire.
- Sur le site du CNES une vidéo sur la forme de la terre.
- Brèves connexes : Mon GPS doit savoir l’heure, Pourquoi corriger les séries climatiques, Hasard et glaciations, Réchauffement climatique ou fin d’une période glaciaire?, Les cycles de Milankovitch.
Crédits Images : UNAVCO, Animation: J. Gazeaux.