Plantes naturelles et plantes virtuelles

Plantes naturelles et plantes virtuelles

Vignes du bordelais et cépage virtuel.

Les plantes naissent, poussent, puis vieillissent et meurent. La vie des plantes, un phénomène en apparence assez banal, relève en réalité d’un ensemble de processus complexes dont certains aspects demeurent encore aujourd’hui peu connus. Que ce soit pour construire, se nourrir, se chauffer, se soigner, ou encore s’habiller, les Hommes aspirent à comprendre les processus de croissance des plantes afin de maîtriser leur développement et leur production. Dans ce but, des chercheurs en biologie, en informatique et en mathématiques se sont réunis pour modéliser et créer des plantes virtuelles.

Une plante virtuelle est un objet géométrique avec une architecture 3D complexe. Pour créer cet objet informatique, il suffit de décrire un processus simple qui se répète à différentes échelles : un tronc engendre des rameaux primaires, qui eux-mêmes engendrent des rameaux secondaires, et ainsi de suite jusqu’aux petits rameaux qui engendrent feuilles, fleurs ou fruits. On peut considérer ces objets comme fractals. Plusieurs raisons à cela : chaque morceau d’un arbre reproduit un arbre plus petit ; c’est la propriété dite d’autosimilarité. D’autre part, le volume d’un arbre finit par stagner, tandis que sa surface continue à croître. Les échanges avec l’extérieur (par exemple la photosynthèse) s’en voient ainsi améliorés.

En première approximation, chaque organe peut être décrit par des formes simples. Un cylindre représente le tronc, un segment, une branche et un polyèdre, une feuille. Cet assemblage nous fournit une représentation grossière d’une plante. A ces formes brutes, on préfère des courbes plus lisses. Les splines (polynômes de degré 3) peuvent alors être utilisées pour approcher plus précisément ces formes complexes. Les pentes, les orientations et les courbures des organes de la plante sont ainsi mieux décrites. Ces objets mathématiques sont aujourd’hui grandement utilisés en infographie, par exemple pour créer les décors des jeux vidéos ou films d’animation.

Même une parfaite représentation géométrique des plantes ne suffit pas à comprendre leur développement et mieux gérer leur production ou leur exploitation. En effet, cette modélisation ne prend pas en compte les contraintes internes et externes. D’une part, internes, car la dynamique générale de la plante est régie par des processus à l’échelle moléculaire : développement des méristèmes  (lieux des divisions cellulaires permettant par exemple la production de nouvelles feuilles, tiges et fleurs), des vaisseaux du xylème (tissus conducteurs transportant l’eau et les minéraux des racines vers les feuilles) et du phloème (tissus conducteurs transportant la sève élaborée par les feuilles vers les autres organes). D’autre part, externes, car, tout comme l’agriculteur influe sur les plantes, le climat est un facteur capital dans le développement des organes.

En raison de la complexité et de l’interaction des événements, les modèles mêlent à la fois aléatoire et déterminisme pour obtenir une description suffisamment réaliste. Les plantes poussent selon des lois mécaniques déterministes, qui dépendent du climat et des ressources. La naissance de nouveaux organes est aussi déterminée en fonction du cumul des ressources, mais leur apparition est aléatoire car on ne sait pas, a priori, de quel type d’organe il s’agit. Par exemple, il faut évaluer avec quelle probabilité une feuille peut bourgeonner. Un modèle aléatoire de type chaîne de Markov est utilisé pour représenter une suite d’événements successifs aléatoires : tronc, branches, feuilles, fruits. À cet aléa s’ajoutent aussi les effets chaotiques de la lumière et du vent sur l’orientation des organes.

Le mélange de géométrie, de probabilités et d’équations différentielles et le développement d’outils numériques, dont l’utilisation est assez intuitive, permettent de simuler la croissance de plantes en quelques secondes là où plusieurs années seraient nécessaires dans des conditions naturelles. Quant aux premières applications, il pourrait s’agir, par exemple, d’une aide à la décision en agronomie ou encore de l’amélioration de la qualité du bois pour la construction.

 

Brève rédigée par Youcef Mammeri (LAMFA Université de Picardied’après les travaux des équipes de Virtual Plants et d’AMAP et de ses propres travaux dirigés par Michel Langlais.

Pour en savoir plus :

Crédits images : Youcef Mammeri.

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