Pollution de l’air par les poussières : quelle part locale ?

Poussières d'usine

Poussières d’usine.

La poussière est constituée de fines particules en suspension dans l’air. C’est une des composantes de la pollution urbaine. La poussière présente dans l’air que nous respirons a deux origines : une part appelée locale, liée directement aux émissions locales (venant du trafic, du chauffage urbain, de l’industrie ou de l’agriculture), alors que le reste, qu’on appelle contribution de fond, est lié au transport à plus grande échelle (régionale ou nationale) de poussières émises ailleurs par l’activité humaine ou d’origine naturelle comme les embruns marins, le sable du désert ou encore les cendres volcaniques.

Le conseil européen a invité les états membres à élaborer des plans pour réduire la pollution due aux particules. Ainsi, la réglementation prévoit que la moyenne journalière des concentrations de poussières ne doit pas dépasser 50 microgrammes par mètre cube plus de 35 jours par an, et la moyenne annuelle doit rester inférieure à 40 microgrammes par mètre cube.

En France, plusieurs plans régionaux ont été définis pour réduire la pollution. Dans ce contexte, déterminer la contribution locale par rapport à la contribution de fond de la pollution particulaire est nécessaire. Cela permet d’évaluer la part de pollution sur laquelle il est possible d’agir et peut aider à adapter le plan régional.

Une évaluation de la contribution locale peut être réalisée en utilisant des modèles déterministes comme CHIMERE, qui est un modèle de transport physico-chimique, conduisant en particulier au système PREV’AIR. Ces modèles fournissent une carte de la pollution pour toute la France à l’échelle régionale. Ils ne sont pas liés aux mesures de pollution des sites de surveillance mais dépendent en revanche de l’inventaire des émissions, imprécis et difficile à acquérir. Les grandes incertitudes qui en découlent conduisent donc à utiliser une approche statistique plutôt que purement déterministe.

Un exemple d’une telle approche a été conduit récemment dans la région Haute-Normandie, pour quantifier les contributions locales et de fond à la pollution aux particules dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres (fraction inhalable), les PM10. Elle se base sur les mesures des polluants sur un réseau de onze sites de surveillance, complétées par des variables météorologiques. Des méthodes statistiques, ici les forêts aléatoires, sont utilisées pour mettre en évidence les effets marginaux des variables influentes de la pollution et en quantifier l’importance.

Dans une première étape, ces effets marginaux sont classés d’après les caractéristiques des stations : certaines sont à proximité du trafic, d’autres mesurent la pollution de fond urbaine ou industrielle et enfin les dernières se trouvent en zones rurales. La pollution locale est ainsi marquée par les traceurs classiques dont les oxydes d’azote pour la pollution urbaine et le dioxyde de soufre pour l’industrielle. La deuxième étape consiste à tirer profit de la spécificité d’une station rurale et côtière, pour laquelle il n’existe a priori pas de sources locales de pollution, puis à l’utiliser comme un marqueur de la pollution de fond. La dernière étape combine les marqueurs d’activités urbaines et industrielles locales et le marqueur de la pollution de fond, pour quantifier les contributions.

Grâce à cette méthode, on a pu montrer qu’en Haute-Normandie, la part locale de pollution par les poussières, celle qui est susceptible d’être atténuée par des mesures règlementaires, ne contribue en général que pour moitié à la pollution totale.

 

Brève rédigée par Jean-Michel Poggi (Université Paris Descartes & Laboratoire de mathématiques d’Orsay) d’après ses travaux avec Michel Bobbia (Air Normand), François-Xavier Jollois (Université Paris Descartes) et Bruno Portier (Laboratoire de Mathématiques de l’INSA de Rouen)

Pour en savoir plus : 

Crédits Images : Wikimedia Commons

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