Reconstruire les variations de températures à l’échelle de la planète avant le 20ème siècle est un défi relevé par des dizaines d’équipes de climatologues à travers le monde. Ce défi relève de deux motivations : comprendre les climats du passé et placer l’évolution actuelle dans une perspective à long terme.
Il y a très peu de mesures de température fiables avant le 20ème siècle (et aucune avant l’invention du thermomètre par Galilée au milieu du 17ème siècle). On a alors recours à des indicateurs historiques (dates de vendanges), biologiques (cernes d’arbres), physiques ou géochimiques (isotopes mesurés dans des sédiments) du climat. On appelle ces indicateurs des proxys.
La plupart des reconstructions climatiques sont obtenues à l’aide d’une régression statistique qui établit une relation linéaire entre les proxys et les séries instrumentales de température sur le 20ème siècle. Cette relation appliquée aux valeurs des proxys dans le passé permet d’obtenir des estimations pour les climats passés. On peut obtenir des reconstructions spatialisées en extrapolant dans le passé des structures actuelles, moyennant des pondérations bien choisies.
Les mathématiques (et en particulier la statistique) sont cruciales pour prendre en compte la variété des échelles de temps qui caractérisent chaque proxy : tous ne répondent pas aux sollicitations climatiques à la même vitesse et certains sont également soumis à des contraintes environnementales non climatiques, comme la proximité d’une rivière ou l’action directe de l’Homme. Ces outils mathématiques ont également permis de calculer l’incertitude sur les reconstructions, en prenant en compte la qualité des proxys, et leur disponibilité au cours du temps et en espace.
Au final, on arrive à un résultat assez remarquable : quelle que soit la base de données de proxys, quelle que soit la méthode de reconstruction et de détermination d’intervalles de confiance, même si les reconstructions peuvent différer dans des détails, on détecte un optimum climatique médiéval (800 à 1350 AD) en Europe, un petit âge de glace (1350 à 1850 AD), et une tendance à un réchauffement jamais observée à partir du milieu du 20ème siècle.
Brève rédigée par Pascal Yiou (UMR CEA-CNRS-UVSQ) d’après ses travaux avec article avec Joël Guiot (CEREGE)
Pour en savoir plus :
- L’article des auteurs : Méthodes statistiques, fonctions de transfert, publié dans Le Climat à Découvert, sous la direction de Catherine Jeandel, Rémy Mosséry, CNRS Editions, Paris, p. 133-136, 2011.
- Brèves connexes : Les cernes d’hier, Réchauffement climatique ou fin d’une période glaciaire ? Dater la fonte des glaciers.
Crédits Images : Scène de vendanges vers 1500 -Musée de Cluny. Wikimedia Commons.
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