Les mathématiques des trous noirs

Le concept des trous noir est d’abord né des mathématiques

Le concept des trous noirs est d’abord né des mathématiques.

Les lois de Newton permettent de calculer la vitesse minimale avec laquelle on doit lancer un objet depuis la surface d’une planète de rayon R et de masse M, pour qu’il parte à l’infini. Cette vitesse de libération vaut \sqrt{2GM/R}G est la constante de gravitation. À la fin du dix-huitième siècle, Laplace et Michell en déduisirent indépendamment que si cette quantité est supérieure à la vitesse de la lumière c, alors rien ne peut s’échapper de cet astre. Le concept de trou noir était né et… tomba aussitôt dans l’oubli : la densité d’un trou noir homogène vaudrait 3c^2/8G\pi R^2, ce qui imposerait un rayon extravagant de l’ordre du milliard de kilomètres pour un trou noir formé de matière ordinaire (le rayon du Soleil est d’environ 1,3 million de km).

La relativité générale remit cet objet obscur en pleine lumière ! La théorie d’Einstein décrit comment la répartition de la matière et de l’énergie dans l’Univers affecte l’écoulement du temps. En conséquence, les rayons de lumière ne suivent pas une ligne droite mais sont déviés par les masses environnantes. En 1916, Karl Schwarzschild exhiba une solution particulière des équations d’Einstein : elle décrit un trou noir sphérique de masse M. Son rayon est nécessairement 2GM/c^2. Robert Oppenheimer, en 1936, proposa un mécanisme de formation de trous noirs par effondrement d’une étoile à neutrons (astre de masse comparable à celle du Soleil, mais de densité plus de 10^{14} fois plus grande !).  Il y a tout juste cinquante ans, Roy Kerr découvrit une autre solution décrivant un trou noir en rotation. C’est une formule compliquée mais qui ne dépend que de deux paramètres : la masse M du trou noir et son moment angulaire a. Il est maintenant certain que les trous noirs de Kerr pullulent dans l’Univers, grâce à des résultats mathématiques de Penrose et Hawking dans les années 1970, puis à des preuves indirectes (par exemple, l’observation optique de la fin d’une étoile, que l’on pense avalée par un trou noir, en 2010 et 2012). En plus de ceux évoqués plus haut, formés par l’effondrement gravitationnel d’astres denses, des trous noirs super-massifs sont tapis dans le noyau central des galaxies. L’existence de trous noirs de la taille d’une particule élémentaire est l’objet de débats animés.

Dans tous les cas se pose la question de leur détection : comment voir un trou noir ? La réponse tient en deux temps : les mathématiciens étudient les solutions de Schwarzschild et de Kerr et peuvent ainsi prédire des phénomènes caractéristiques de la présence d’un trou noir, que les astrophysiciens cherchent ensuite à observer. Description et détection de trous noirs ont ainsi suscité des développements mathématiques… tout aussi fascinants que ces objets mystérieux qui peuplent l’Univers. Nous en saurons plus bientôt…

Brève rédigée par Alain Bachelot (Univ. de Bordeaux, Institut de mathématiques).

Pour en savoir plus :

  • John Archibald Wheeler, « A Journey into Gravity and Spacetime », Freeman, 1999.
  • Jean-Pierre Luminet, « Les trous noirs », Le Seuil, Point Sciences, 1992.
  • Brèves connexes : « Voir les trous noirs.

Crédits Images : Wikipédia Commons/Alain r.

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