Alexis Clairaut.
Aujourd’hui nous fêtons le tricentenaire de la naissance d’Alexis Clairaut (1713-1765). Sa notoriété est presque aussi précoce que celle de Mozart : il lit son premier mémoire à l’Académie des sciences alors qu’il n’a pas treize ans, pour y entrer « finalement » à dix-huit ans. L’âge légal minimum pour entrer dans cette institution étant de 20 ans, le Roi, pour la première fois, lui donne une dispense spéciale ! Ce grand mathématicien contribue à fonder la théorie des « courbes gauches » (courbes qui ne restent pas dans un plan), puis étudie les équations différentielles. Il réussit enfin à faire cadrer la théorie du mouvement de la Lune avec celle de la gravitation et connaît probablement sa plus grande gloire « médiatique » en prédisant le retour de la comète de Halley pour avril 1759, avec une incertitude d’un mois seulement.
Mais au fait, en 2013, devons-nous dire « mathématicien » ou « géophysicien » pour qualifier ce scientifique ? Cette question n’avait bien entendu aucun sens au 18ème siècle puisque la géophysique n’existait pas comme discipline autonome et un certain nombre de ses problématiques rentraient de façon naturelle dans le champ des « sciences mathématiques ». Néanmoins, de nos jours son nom est au moins aussi connu dans le monde de la géophysique que des mathématiques. Sa Théorie de la figure de la Terre (1743) est un ouvrage majeur de la géophysique. Alexis Clairaut y développe une théorie qui donne la forme de la Terre et de ses couches intérieures, à peu de chose près des ellipsoïdes de révolution dont l’aplatissement est donné en fonction de la vitesse de rotation de la Terre et des mesures de pesanteur. Ce qui est remarquable avec cette théorie physique, c’est non seulement qu’elle coïncide très bien avec l’aplatissement observé mais qu’elle est toujours utilisée, quasiment à l’identique, de nos jours. C’est peut-être même la première théorie aboutie de l’histoire de la géophysique interne.
Figure extraite de l’ouvrage de Clairaut, la Théorie de la figure de la Terre, 1743. (L’intérieur de la Terre est stratifié en « couches de niveau ». La théorie hydrostatique, toute nouvelle, est appliquée en égalant la pression dans les canaux virtuels qui la parcourent.)
Brève rédigée par Frédéric Chambat (École Normale Supérieure de Lyon).
Pour en savoir plus :
- Étienne Ghys, « Querelle franco-anglaise autour de la forme de la Terre », brève MPT2013.
- Vincent Deparis, La forme de la Terre : plate, oblongue ou aplatie aux pôles ?.
- Chronologie de la vie de Clairaut (1713-1765), site de référence sur Clairaut.
- Olivier Courcelle, «Clairaut enfant» I, II, III— Images des Mathématiques, CNRS, 2013.
- Jean Delcourt, Analyse et géométrie : les courbes gauches de Clairaut à Serret et Frenet, thèse UPMC 2007.
- Élisabeth Badinter, Les passions intellectuelles, I. Désirs de gloire (1735-1751) (1999) ISBN-13: 978-2253084679.
Crédits image : Wikimedia Commons.
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