Bancs de poissons

Bancs de poissons

Une tornade de poissons.

Chaque année entre mai et juillet, des millions de sardines coordonnent leur déplacement lors du Sardine Run pour aller pondre sur leur lieu de naissance. Elles forment un banc de 7 km de long, 1,5 km de large et 30 m de profondeur, qui longe les côtes sud-africaines. Dans les bancs de poissons comme dans les nuées d’oiseaux, des actions parfaitement coordonnées apparaissent ainsi à grande échelle malgré l’absence apparente de leader. Ces phénomènes de mouvement collectif fascinent depuis longtemps observateurs et scientifiques et suscitent de nombreuses interrogations. En effet, les mécanismes qui les régissent nous échappent car ils semblent reposer sur des interactions sociales au sein du groupe.

Dans un travail collaboratif, des biologistes et des physiciens ont eu l’idée de modéliser un banc de poissons par un système d’un grand nombre d’entités interagissant entre elles. Dans ce modèle dit des « particules autopropulsées en interaction », les poissons sont représentés par des particules, toutes identiques, dont le déplacement individuel ne dépend que de sa vitesse et de la position des autres particules. Une particule est donc soumise à une force d’autopropulsion (sa mise en mouvement), à une force de friction due au fluide environnant (ici l’eau de la mer), ainsi qu’à des interactions de type attraction à longue portée / répulsion à courte portée avec les autres particules. Cette dernière force rend compte des interactions sociales mentionnées plus haut ; ainsi, un poisson ne veut pas heurter ses voisins mais ne veut pas non plus trop s’en éloigner. En dépit de sa simplicité, ce modèle est cohérent avec la réalité biologique. Les poissons possèdent en effet un organe sensoriel appelé « ligne latérale » qui leur permet de détecter la position d’autres poissons grâce aux vibrations de l’eau.

L’étude mathématique de ce modèle ainsi que des simulations par ordinateur ont permis de reproduire des comportements complexes, comme l’aspect apparemment grouillant du banc de poissons alors que celui-ci est en fait organisé. Ainsi, les individus orchestrent collectivement leurs déplacements en trois dimensions, de sorte que, comme le pensent les biologistes, leurs mouvements paraissent confus pour leurs prédateurs (requins, oiseaux, otaries, dauphins, etc.). Cette étude mathématique très prometteuse n’est qu’une première étape vers l’élaboration de modèles plus sophistiqués, prenant notamment en considération l’influence des courants, des fonds marins et des prédateurs sur les mouvements des bancs de poissons. Ces modèles nous permettront d’identifier et de comprendre les phénomènes majeurs à l’origine des comportements observés.

Brève rédigée par Pauline Lafitte (École Centrale Paris) et Hugo Magaldi (École Centrale Paris) d’après les travaux de Andrea Bertozzi (UCLA), J.-A. Carrillo (Imperial College), F. Vecil (Univ. Clermont-Ferrand) et P. Lafitte (École Centrale Paris).

Pour en savoir plus :

Crédits Images : Wikimedia commons.

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