L’origami est l’art traditionnel du papier plié. C’est une source d’activité créative s’appuyant sur de profondes théories mathématiques. Publié en 2007 dans la célèbre revue Nature, un article s’intéresse aux travaux du docteur Taketoshi Nojima de l’université de Tokyo, qui est arrivé à reproduire par l’origami un grand nombre de formes naturelles complexes : nautiles, membranes, éponges ou pommes de pin par exemple.
Pourtant, pour établir si on peut fabriquer un origami à partir d’une suite de pliages dessinés sur une feuille, il faut tester tous les pliages. En 1996, deux informaticiens américains, Marshall Bern et Barry Hayes, montrent que ce problème est équivalent à un problème important en logique baptisé 3-SAT. On sait que ce problème est très difficile : il n’y a pas de raccourci possible et pour des structures complexes, sa résolution peut prendre plus de temps qu’il ne s’en est écoulé depuis la naissance de l’Univers ! L’astuce de Taketoshi Nojima est d’être parvenu à résoudre quelques cas particuliers en observant attentivement la nature et la croissance de certaines espèces végétales et animales.
L’origami, qui peut être vu comme un jeu de l’esprit, peut également s’avérer pratique car pour obtenir des objets en trois dimensions, il suffit de partir d’une simple feuille. Quel rêve pour le constructeur (par exemple : pour un architecte contemporain) ! Le transport des origamis de Nojima est pratique car, une fois les objets repliés, il ne présente aucun problème logistique. On peut donc dire que cette démarche pourrait s’inscrire dans le cadre du développement durable puisque les phases de fabrication et de logistique sont optimisées.
Le 8 février 2012, la deuxième conférence du cycle « Un texte, un mathématicien » de la Société Mathématique de France (SMF) était donnée par le physicien et mathématicien Tadashi Tokieda à la Bibliothèque Nationale de France. Son point de départ était un texte célèbre de Siméon-Denis Poisson : « Mémoire sur l’équilibre et le mouvement des corps élastiques ». En pliant et en froissant une feuille de papier, il a abordé une grande variété de sciences en germe, depuis les tours de passe-passe et la géométrie jusqu’à la physique de l’élasticité et l’art japonais traditionnel de l’origami. Tout son exposé était articulé autour du rapport de Siméon-Denis Poisson. Cette magnifique conférence a été enregistrée : elle est disponible ici !
Brève rédigée par Didier Bresch (CNRS, Univ. Chambéry) sur la base des articles en référence.
Pour en savoir plus :
- Taketoshi Nojima, « Origami modeling of functional structures based on organic patterns ».
- Ian Stewart (2007), «Some assembly needed», Nature.
- Exposé de Takashi Tokieda à la BNF : «Science à partir d’une feuille de papier».
- «L’origami dans le sanctuaire de l’algorithmique», La recherche, mensuel n°309, pp 20.
- Pierre Arnoux, «La nature en pliage», La Recherche, mensuel n°414, pp 27.
- Jean-Jacques Dupas, «Origami pour la biologie» Maths Nature Express.
Crédits images : Par ordre Taketoshi Nojima, Régis Goiffon, Sylvie Benzoni.