Aussi incongru que cela puisse paraître, comprendre les phénomènes climatiques extrêmes aide à stabiliser l’économie française. En effet, les catastrophes naturelles ont un impact non négligeable sur cette dernière. Les dommages matériels et humains se répercutent logiquement sur les compagnies d’assurances, comme en France via les assurances MRH (Multi Risques Habitation) et Cat Nat (Catastrophes Naturelles). Ce genre de catastrophes très intenses peut réellement mettre en péril les assureurs : prenons l’exemple du cyclone Andrew, qui a ravagé la Floride en 1992 et a causé la faillite de onze compagnies d’assurance.
Afin de diminuer ce risque, une partie des pertes assurées peut être cédée à des réassureurs, qui sont les assureurs des assureurs. Une autre fraction peut être transférée aux marchés financiers via des titres, les obligations catastrophes (Cat bonds). En France, le principal réassureur est la CCR (Caisse Centrale de Réassurance), qui possède la garantie illimitée de l’Etat. Indirectement, les acteurs concernés sont donc les institutions financières, les marchés financiers et l’Etat. Finalement, par effet de contagion, l’économie dans son ensemble peut se trouver affectée par une catastrophe naturelle.
La réforme de la réglementation prudentielle (règles régissant la bonne conduite des banques afin d’éviter les faillites en cascade) européenne dans le domaine de l’assurance, Solvabilité II, impose justement une meilleure évaluation des différents risques, et notamment ceux liés aux événements climatiques. D’où l’importance d’élaborer des mesures de risque adaptées au contexte actuel de changement climatique dans lequel la fréquence de certains événements extrêmes tend à s’accroître.
Afin de pouvoir élaborer ces mesures ou de quantifier ces risques, une approche est de s’intéresser à la loi de probabilité du maximum annuel des variables météorologiques (précipitations, vent, températures, etc.). La loi de ces extrêmes en une ou quelques stations peut être facilement obtenue si l’on dispose d’un historique d’observations suffisamment large. Mais plus que la loi en quelques points, c’est le comportement du maximum annuel en tous points d’une région qui intéresse les assureurs. Clairement, le risque d’inondation est beaucoup plus élevé s’il pleut beaucoup sur une vaste région que s’il pleut seulement en un endroit très localisé. Il convient également de comprendre la dépendance spatiale pour déterminer les propriétés du maximum en des sites où l’on ne dispose pas de stations d’observation. Les processus max-stables constituent l’outil probabiliste adéquat. A l’intersection de la statistique des événements extrêmes et de la géostatistique, ils permettent de modéliser des maxima sur toute une région en tenant compte de la dépendance spatiale. Ils répondent ainsi aux deux aspects du problème. Des modèles paramétriques rendent leur utilisation pratique possible permettant ainsi la construction de mesures de risque telles que des niveaux de retour (les niveaux dépassés en moyenne pour une période donnée, comme les crues centennales par exemple) ou la probabilité d’occurrence d’événements extrêmes simultanément en plusieurs sites.
Brève rédigée par Erwan Koch , Pierre Ribereau et Christian Robert d’après leurs travaux à l’ISFA (Univ. Lyon 1) et au CREST-ENSAE (Insee).
Pour en savoir plus :
- Projet MIRACCLE, Mesures et Indicateurs de Risque Adaptés au Changement Climatique.
- Colloque Écosystèmes et Événements climatiques extrêmes à l’Académie des Sciences.
- An introduction to max-stable processes par Mathieu Ribatet, i3m, 2011 [en anglais].
Crédits Images : Wikimedias Commons/Nicolas Dessaux.
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