Des triangles pour vérifier la gravitation universelle

"Application

Mesure de distance par triangulation. Illustration du 16ème siècle.

La triangulation, méthode proposée par Frisius en 1533, est appliquée semble-t-il pour la première fois en 1617 par le néerlandais Willebrord Snellius pour déterminer une distance entre deux villes. Mais c’est le français Jean-Félix Picard qui le premier mesure précisément, en 1669-70, la longueur d’un arc de méridien (entre Amiens et Paris) et donc le rayon terrestre, grâce à la triangulation.

Par des méthodes astronomiques, on connaissait déjà le rapport de la distance Terre-Lune au rayon terrestre (rapport égal à environ 60). Si Newton a raison en affirmant que la gravitation varie comme l’inverse du carré de la distance, il faut donc que l’attraction de la Terre à sa surface soit 602 = 3600 fois plus grande qu’au niveau de l’orbite lunaire. Newton a bien évidemment la valeur de l’attraction à la surface terrestre puisqu’il connaît l’accélération d’une pomme en chute libre. Et par un astucieux calcul, il détermine l’accélération de la Lune sur son orbite : celle-ci est égale au produit du carré de la vitesse angulaire de révolution de la Lune (1 tour en 27 jours) par la distance Terre-Lune (ou 60 fois le rayon terrestre). La seule inconnue est le rayon terrestre, et le connaître permet donc de tester la loi en inverse du carré de la distance.

Or, avant la mesure décisive de Picard, Newton n’a à sa disposition que des estimations imprécises du rayon terrestre, celles-ci ne coïncident pas toutes avec sa théorie. La mesure de Picard arrive à point nommé et apporte la dernière pierre à l’édifice de Newton (Philosophiae Naturalis Principia Mathematica, 1687) : elle est plus précise que les précédentes et coïncide avec ses prédictions !

La gravitation est bien 3600 fois moins grande au niveau de l’orbite lunaire qu’à la surface de la Terre. Il manquait juste une mesure de longueur et un peu de génie pour le prouver.

Brève rédigée par Frédéric Chambat (École Normale Supérieure de Lyon) et Étienne Ghys (CNRS et École Normale Supérieure de Lyon).

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Crédits images : Wikimedia commons.

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