Les difficultés de la modélisation mathématique des épidémies

Épidémie de rougeole en France (2008-2012)

Au XVIIIe siècle, Daniel Bernoulli a utilisé le calcul infinitésimal et le calcul des probabilités pour étudier si l’inoculation de la variole permettrait d’augmenter l’espérance de vie. Sa méthode a été vivement critiquée par d’Alembert. Au début du XXe siècle, des médecins britanniques ont développé des modèles mathématiques pour des maladies infectieuses telles que le paludisme ou la peste. Ces modèles expliquaient qualitativement deux phénomènes. Tout d’abord, pourquoi le paludisme peut disparaître d’une localité si le nombre de moustiques devient inférieur à un certain seuil. Ensuite, pourquoi une épidémie s’arrête toujours avant d’avoir infecté tous les habitants d’une région. Depuis les années 1950, la modélisation mathématique des épidémies s’est considérablement développée. L’accent a été mis tantôt sur les modèles stochastiques (processus de branchement, graphes aléatoires), tantôt sur les modèles déterministes (équations différentielles, équations aux dérivées partielles). Cependant de nombreux problèmes demeurent.

Les épidémies sont un peu comme les comètes. Il est difficile de prévoir quand elles apparaîtront pour la première fois. Mais une fois qu’elles ont été observées pendant un peu de temps, on aimerait pouvoir prédire quelle sera la trajectoire qu’elles suivront. Les mathématiques ont permis de résoudre ce problème pour les comètes avec une précision extrême. En revanche, prédire quel sera par exemple le nombre total d’individus qui auront été infectés à la fin d’une épidémie reste très difficile. Dans ce domaine, le quantitatif doit remplacer le qualitatif. Comme le résultat dépend de subtiles interactions entre les caractéristiques biologiques de la maladie, la société dans laquelle elle se propage et les conditions climatiques environnantes, il n’est pas sûr que l’on parvienne réellement un jour à des réponses satisfaisantes. Peut-être faudra-t-il se contenter de prévisions à très court terme, comme cela se fait pour les prévisions météorologiques.

Brève rédigée par Nicolas Bacaër (IRD).

Pour en savoir plus :

Crédits Images : Institut de Veille Sanitaire.