Pourquoi l’aire de répartition de certaines espèces est limitée ?

Le babouin jaune en Afrique

Aire de répartition du babouin jaune en Afrique.

Lorsque l’on traverse un continent, on peut observer que par endroits, des espèces abondantes déclinent ou disparaissent complètement. Cette limitation de l’aire de répartition est souvent liée à des obstacles géographiques comme une montagne ou un océan, ou encore à des changements plus ou moins importants de l’environnement, comme la température. Quels éléments déterminent la zone à partir de laquelle la population ne peut plus survivre ? À la limite de l’aire de répartition d’une espèce, les conditions géographiques sont défavorables à tel point qu’il est impossible pour la population de survivre au-delà. Pourquoi la population ne s’adapte donc pas, à l’aide de mutations, à ces conditions géographiques pour ainsi élargir son aire de répartition ?

Cela s’explique en partie par le fait qu’à la périphérie de la zone d’habitat de l’espèce, il y a une grande influence des gènes qui viennent de la zone centrale, en raison de la dispersion spatiale. C’est ce qu’on appelle le flux de gènes. Ces gènes étant adaptés à des zones centrales et non pas à la périphérie, la population est localement mal adaptée et ne peut pas étendre son aire de répartition.

Cet effet indésirable est plus important pour les populations sexuées. Pour les populations asexuées, si un nouveau-né, grâce à une bonne mutation, a un taux de reproduction élevée, il a une bonne chance de se reproduire et de donner lieu à une population importante disposant de ces gènes localement adaptés. Mais dans le cas des populations sexuées même si un individu a une bonne mutation, l’effet de cette mutation au moment de la reproduction va être affaibli par les gènes de l’autre parent. Ainsi, lorsque l’environnement change rapidement en espace, la dispersion importante de la population peut empêcher son adaptation locale.

Les scientifiques ont établi un modèle à partir d’équations aux dérivées partielles, en prenant en compte trois phénomènes : la diffusion des individus dans l’environnement, leur avantage en terme de reproduction et la reproduction sexuée avec les mutations. Les scientifiques ont étudié ce modèle en considérant un environnement qui change linéairement le long d’une direction. Ils ont montré que si ce changement est très rapide, le modèle admet des solutions stationnaires, correspondant à des populations qui restent restreintes à une aire de répartition limitée. Dans un milieu qui change moins rapidement, le modèle prédit au contraire que la population étend constamment son aire de répartition.

Brève rédigée par Sepideh Mirrahimi (Univ. Toulouse 3), d’après ses travaux avec Gaël Raoul (Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive), ainsi que ceux de Mark Kirkpatrick (Univ. Texas USA) et Nick Barton (Univ. Edinbourg).

Pour en savoir plus :

  • M. Kirkpatrick and N.H. Barton (1997), « Evolution of a species’ range ». Amer. Nat. 150 (1) :1–23 [En anglais].
  • S. Mirrahimi and G. Raoul (2013), « Population structured by a space variable and a phenotypical trait ». Theo. pop. Biol., 84 :87-103 [En anglais].
  • N.H. Barton (2001), « Adaptation at the edge of a species range ». In: Silvertown, J., Antonovics, J. (Eds.), Integrating Ecology and Evolution in a Spatial Context. 14 :365–392. Blackwell, Oxford [En anglais].
  • M. Alfaro, J. Coville, G. Raoul (à paraître), « Travelling waves in a nonlocal reaction-diffusion equation as a model for a population structured by a space variable and a phenotypical trait ». Communications in Partial Differential Equations [En anglais].
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Crédits Images : Wikimedia Commons.

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