Quelle est la forme des rivières ?

Transition des tresses aux méandres pour une rivière en Asie.

Les plateaux, les plaines et les montagnes sont des reliefs creusés par des rivières qui façonnent le paysage au cours du temps. Plusieurs questions se posent alors : les rivières continuent-elles à creuser ces reliefs ? Quelles doivent être leur largeur et leur pente pour rejoindre la mer ? Quelles sont les chances pour qu’une ville construite à proximité d’un cours d’eau soit inondée, ou, au contraire, pour que la rivière disparaisse ? Enfin, il existe dans le paysage deux types distincts de rivières, des rivières en tresses (avec plusieurs chenaux) et des rivières en méandres (avec un seul chenal), une rivière donnée pouvant passer des tresses aux méandres en quelques kilomètres. Comment expliquer un changement aussi radical ?

Pour répondre à ces questions, on essaye d’estimer la forme d’équilibre d’une rivière en fonction de la quantité d’eau et de sédiments qu’elle transporte. Pour étudier les rivières, on commence par observer les cours d’eau dans la nature. Cela nous permet de comprendre leur comportement global (plus le débit d’eau est élevé, plus les rivières sont larges et moins elles sont pentues). Malheureusement, chaque rivière présente différentes caractéristiques (en particulier de végétation), ce qui rend parfois la prise de mesures difficile. Pour nous affranchir de ce problème, nous reproduisons en laboratoire des mini-rivières (faisant typiquement 10 cm de large et 2 m de long) qui sont une mise à l’échelle du problème (la physique est la même que celle qui gouverne les phénomènes naturels mais sur une longueur et un temps caractéristiques différents). L’étude de ces analogues des rivières naturelles nous renseigne par exemple en détail sur le comportement des sédiments dans l’eau. Au final, l’interaction entre les sédiments et l’écoulement d’eau est mise en équations.

L’étude des équations met en évidence deux régimes asymptotiques, c’est-à-dire deux grands types de solutions possibles à ces équations. Une rivière transportant très peu de sédiments aurait une section de forme sinusoïdale. Au contraire, une rivière transportant une infinité de sédiments doit être plate et infiniment large. La transition peut-être calculée grâce à la théorie des perturbations en développant notre équation proche des asymptotes. On peut montrer que la forme évolue continûment avec l’apparition puis l’élargissement d’une partie plate au centre de la rivière au fur et à mesure que le débit de sédiments augmente.

Cette analyse nous permet de prédire comment la largeur d’une rivière va varier avec son débit, pour des systèmes de dimensions allant de celles d’une canalisation standard à celles du fleuve Amazone. De même, nous estimons que le passage des tresses aux méandres est certainement lié à une diminution de la pente.

Brève rédigée par Grégoire Seizilles et Alexandre Fournier (IPGPUniv. Paris Diderot)  d’après les travaux de Grégoire Seizilles , Olivier Devauchelle, Eric Lajeunesse, et François Métivier (IPGPUniv. Paris Diderot).

Pour en savoir plus :

Crédit image : GoogleEarth et annotations de Grégoire Seizilles.

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