La Terre gronde, les mathématiciens écoutent

Image satelitte de l'archipel d'Hawai  NASA. Image courtesy Jacques Descloitres, MODIS Land Rapid Response Team at NASA GSFC. (IotD Date: 2003-06-03. IotD ID: 15304)

Image satellite de l’archipel d’Hawaï

Mathématiciens et géophysiciens unissent leurs efforts pour comprendre les processus de formation des îles volcaniques isolées. Sur le fond des océans, les roches les plus récentes se retrouvent le long des dorsales où les plaques tectoniques divergent. L’activité volcanique le long de ces dorsales fait remonter du magma depuis le manteau, lequel forme de nouvelles roches. Mais il existe aussi des îles volcaniques isolées comme Hawaii, Tahiti, les Açores, le Cap-Vert, etc. Si on regarde l’archipel d’Hawaï, les îles sont alignées par ordre d’âge décroissant, avec l’île la plus récente à l’extrémité est de l’archipel. Les géophysiciens en ont déduit que ces îles seraient formées par un panache volcanique, c’est-à-dire une sorte de cheminée volcanique passant au travers du manteau terrestre, zone qui sépare croûte et noyau de la planète.

 

Puisque la plaque tectonique de surface se déplace, la présence d’un panache expliquerait la formation successive d’îles alignées, dont la différence d’âge pourrait être calculée par la distance entre les îles et la vitesse de la plaque tectonique. Mais il faut apporter des éléments de preuve pour que la conjecture soit définitivement acceptée par la communauté scientifique, l’un de ces éléments pouvant être de voir le panache. Un outil pour explorer l’intérieur de la Terre est la télédétection : on envoie des signaux et on analyse les signaux réfléchis ou réfractés sur les différentes couches dans le sol. La technique est utilisée pour chercher du pétrole. Mais les panaches sont si profonds sous la croûte terrestre que les signaux artificiels ne sont pas assez puissants pour une telle analyse. Les seuls signaux suffisamment puissants pour analyser les détails à une telle profondeur sont les ondes sismiques générées par les grands tremblements de terre. L’équipe travaillant avec la mathématicienne Ingrid Daubechies a eu accès à de grandes bases de données contenant les enregistrements captés par les stations sismiques autour de la planète.

Hotspot

Schéma montrant un panache volcanique à l’origine de plusieurs îles volcaniques isolées.

Les données existent donc et il ne manque plus qu’un bon outil pour les analyser. Le problème est loin d’être simple. Les panaches sont très fins et de plus, la différence de vitesse d’une onde sismique au travers d’un panache n’est que de l’ordre d’1%, de sorte que le risque d’erreurs est grand. Il faut donc utiliser un outil adapté à la description de petits détails locaux. Des progrès décisifs ont été obtenus depuis 2005 par les sismologues Tony Dahlen et Guust Nolet, et par Ingrid Daubechies. En effet, en analysant les ondes sismiques, on peut détecter des zones de perturbation des ondes de pression (ondes P) des tremblements de terre. On s’est aperçu que ces régions chevauchaient exactement les régions comprenant des îles volcaniques isolées et que la température du fond océanique était plus élevée dans ces régions. L’analyse de Dahlen, Daubechies et Nolet repose sur les ondelettes, technique de base pour la reconstruction d’images et outil puissant et précieux pour la description de détails très fins.

Brève rédigée par : Christiane Rousseau (Univ. Montréal), d’après la conférence de Ingrid Daubeschies (Univ. Princeton) « Mathématiques de la planète Terre de la série Simons le 10 avril 2013 à Montréal ».

Pour en savoir plus :

Crédits Images : NASA. Image courtesy Jacques Descloitres, MODIS Land Rapid Response Team at NASA GSFC. (IotD Date: 2003-06-03. IotD ID: 15304).

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